Le psychodrame, une pratique contemporaine ancienne
Le « psychodrame », dans son assertion courante et populaire, est une situation dramatiquement tendue, révélatrice d’un conflit interpersonnel. Dans les pratiques thérapeutiques, le psychodrame émerge à Vienne dans les années 1920 grâce à l’inventivité du psychiatre Jacob Levy Moreno. Celui-ci s’inspire des jeux de rôles, pour un théâtre thérapeutique de la spontanéité et a l’audace de mettre la catharsis du côté de l’acteur, celui que devient le patient, et non plus seulement du côté spectateur. Le psychodrame devient « psychanalytique » dans les années 1950 à la faveur de sa découverte par des analystes français qui voient dans ces scènes jouées par les patients un matériel précieux à interpréter, et un véhicule du transfert, comme le sont les scènes du rêve. Mis en place dans le cadre des premières structures ambulatoires recevant des enfants et des adolescents (avant l’avènement des Centre-Médico-psychologiques dans les années 1960), le psychodrame permet de déployer et d’augmenter l’outil analytique freudien par l’apport de la mise en scène, de la mobilisation du corps et des ressources symbolisantes du groupe. Le psychodrame se développe alors comme traitement de ce qui est en deçà ou au-delà du cadre nucléaire de la névrose afin d’accueillir ce qui dépasse le mot. Il écoute tout un autre matériel associatif polymorphe pour donner forme, par exemple, à ce qui s’associe primairement par le corps, ou à ce qui se rencontre quand deux appareils psychiques décident de jouer ensemble en incarnant des personnages, ou encore à ce qu’un groupe peut offrir comme une somme d’appuis et de présences tangibles : tout ceci pour soutenir la symbolisation de ce qui se trame quelque part, mais qui ne peut advenir et exister par la seule parole dans la paire analytique habituelle. Et ce, pour des patients auxquels manquent…