Vivons-nous réellement, dans ce confinement imposé par la prophylaxie antivirale, une époque si inédite ? La gestion de la crise se fait naturellement selon les lignes de force du monde d’avant la crise, elle en amplifie même certaines directions et imposera, si l’on veut vraiment du différent, d’en analyser les pratiques en soupesant sans naïveté ce qui y aura été poursuivi « viralement », bêtement voire monstrueusement.
L’écho du vide est une peinture de Salvador Dali, visible dans l’exubérant musée de Figueras. Une bande sableuse s’y confond à un ciel lourd ; à droite se tient un arbre en voie de fossilisation, prenant l’apparence d’un silex usé, percé ; du coin gauche, une masse informe se profile, marron et pleine, sa limite est inconnue ; elle surplombe un personnage frêle qui avance, vêtu d’une sorte de blouse blanche. Puisqu’il n’y pas d’autre personnage, celui-ci en apparaît entouré d’une « distanciation sociale » parfaite.
Enfin… on imaginera ici beaucoup : par exemple la mère occupée de son chagrin (l’histoire est connue : celle de Dali venant de perdre un fils lorsque le « nouveau » Salvador vint au monde), son sein sec pour l’enfant qui s’identifie à elle, de désirer la comprendre, sa tâche à lui de traverser la déprime et de trouver des formes sur l’informe. Là est bien l’œuvre de l’artiste, de nous donner en provoquant notre imagination (aire transitionnelle). Ainsi on pourra voir dans cette scène désolée la solitude du contemporain, également - pourquoi pas ? - la ruine de ce qui fut imaginé fertile et qui, parce que le constat fut fait que les arbres jamais ne montent au ciel, aura été crevassé au profit d’énigmatiques conglomérats. Bref la mutualisation d’un côté, la marchandisation de l’autre, le service public et les fonds de pension ou…