En 2003, un dossier consacré à l’hospitalisation des jeunes suicidants et coordonné par le Pr Jeammet paraissait dans Le Carnet Psy1. La question qui anime alors la discussion nous semble toujours d’actualité : « quel mobile peut conduire un adolescent à tenter de mettre fin à ses jours ? », interroge le Pr Jeammet. Et de poursuivre en demandant qui de la société, la famille ou l’adolescent est vraiment malade, pour rapidement nous répondre : « quelle que puisse être la réalité de l’influence de l’évolution sociale, elle ne rend pas compte du choix des adolescents les plus sensibles à cette influence ». Que penser de cette réponse face à une actualité clinique qui révèle une « pandémie silencieuse » du suicide juvénile, dans l’après-coup de sa cousine plus bruyante du COVID-192 ? En effet, le rapport de la Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques (DREES) relève un fait qu’il qualifie de « nouveau », l’augmentation très marquée des recours aux soins pour gestes suicidaires chez les adolescents3. Les constats statistiques confirment l’effarement clinique qui se mue en une force de révolte comme en témoignent dans les médias les nombreuses alertes et tribunes de pédopsychiatres hospitaliers.
À la frontière de l’intime et du public
Une révolte, oui, mais contre quoi ? C’est précisément la question qui traverse adolescents en détresse et professionnels du soin face à leur impuissance à répondre à cette vague de mal être. Qu’accuser ? L’élitisme scolaire ? Les réseaux sociaux ? Ou bien le manque de moyens à l’hôpital ? Les politiques sanitaires du COVID et l’effet des confinements ? Les guerres en Europe ? L’état de la planète ? Faute de ne trouver de réponse qui offre une prise sur…
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