La première psychanalyse d’enfant de D.W. Winnicott était celle d’un délinquant suivi au sein d’une institution qui n’a pas toléré les actes transgressifs de ce garçon. Il a d’ailleurs inventé un diagnostic qui l’aurait considérablement aidé dans sa pratique : « Enfant pour qui je ne peux rien », préconisant la nécessité d’une prise en charge par la société, d’une prise en main de l’enfant, afin de ne pas le laisser tomber comme son environnement initial a pu le faire. Dans la tendance antisociale, l’enfant cherche quelque chose de bon qu’il a expérimenté et qui lui a été retiré. Pas de privation mais une séparation, un retrait qui « a dépassé la durée pendant laquelle l’enfant est capable d’en maintenir le souvenir vivant », nous dit Winnicott. La notion de séparation est ainsi présente dans la tendance antisociale, renvoyant à l’idée d’une rupture de continuité, une rupture de l’environnement interdisant à l’enfant la possible prise en charge de lui-même, c’est-à-dire l’adaptation à soi-même, à sa propre destructivité. À travers la tendance antisociale : « l’enfant cherche (...) la stabilité de l’environnement qui pourra supporter la tension résultant du comportement impulsif ; c’est la quête d’un environnement perdu, d’une attitude humaine qui, parce que l’on peut s’y fier, donne la liberté à l’individu de bouger et d’agir et de s’exciter1 » écrit Winnicott. La tendance antisociale est un signe d’espoir et c’est à cet espoir que la société en général et plus spécifiquement les thérapeutes d’enfants au sens large doivent répondre, sauf à considérer que ces formes d’expressions sont « sans objet », sans destinataire, et à réprimer.
J’aimerai évoquer avec vous, non pas les incidences pathogènes des séparations sur le fonctionnement psychique de l’enfant, mais la dimension potentiellement thérapeutique de la séparation, lorsqu’elle est proposée dans le cadre de placements en institution.…