L’utilisation de médiations dans le travail thérapeutique, notamment auprès des patients souffrants de problématiques narcissiques-identitaires, est de plus en plus répandue dans les milieux du soin. Or force est de constater que, si l’on excepte quelques travaux référentiels2, la théorisation générale de ces dispositifs et des pratiques qui s’y développent, de même que la théorisation de leurs indications spécifiques et celle de l’évaluation de leurs effets, n’ont pas suivi l’ampleur du phénomène clinique. Nombre des pratiques ainsi organisées se transmettent par voie orale directe, et celles qui ont reçu un premier niveau de formalisation et une première ébauche de théorisation des processus qui s’y développent, en restent souvent au mieux à un niveau de réflexion « régional » sans dégager une théorie d’ensemble de l’utilisation des médiations. C’est dans ce contexte que je me propose d’avancer quelques réflexions sur ce que pourrait être une telle théorie.
Théorie de la souffrance et théorie du « soin psychique »
Une réflexion sur la fonction thérapeutique de tous les dispositifs de soin passe inévitablement par le préalable d’une théorie de la souffrance psychique et du soin à lui apporter, c’est ce qui donne sens au soin et à l’action thérapeutique, et une théorie de la place de la médiation au sein d’une théorie du soin et de la symbolisation.
On peut commencer par remarquer que tous les dispositifs de soin sont des dérivés sophistiqués des dispositifs sociaux spontanés du champ culturel, artistique ou artisan qui étayent l’activité de symbolisation. On peut en effet distinguer trois types de dispositifs « symbolisants », dont l’une des fonctions est de sous-tendre le processus de symbolisation : les dispositifs sociaux ou dispositifs « institutionnels », les dispositifs artistiques ou artisans, qui utilisent un médium emprunté…