Transgresser, c’est passer outre, mais aussi aller au-delà. La transgression a donc deux visages : elle constitue en une violation des interdits générant violence ou destructivité comme elle peut aussi être considérée comme structurante, point de départ de créativités nouvelles, émancipatrices. Elle a donc une portée fondamentale pour le psychisme. Si elle n’est pas un concept psychanalytique, elle est une notion aussi familière, difficile à cerner, fluctuant selon les cultures et les époques, concept autant indispensable qu’insaisissable. C’est pourtant, ce à quoi s’emploie les auteurs de cet ouvrage collectif.
Le premier chapitre traite des liens entre transgression et psychanalyse. Pour R. Kaës, l’invention de la psychanalyse par Freud est un acte transgressif fondateur. Toute l’histoire de la psychanalyse est traversée de transgressions techniques, depuis Ferenczi, qui ne sont pas des dérives, mais des ajustements toujours inspirés par les règles de base de la méthode psychanalytique. Ces transgressions créatrices, ces extensions de la pratique de la psychanalyse vont susciter de fortes résistances « épistémophobiques » et des rejets de la part de « l’establishment psychanalytique » parce qu’elles sont en contradiction avec l’idéal de la cure individuelle. La psychanalyse des groupes et des institutions en est l’exemple paradigmatique. Elle est éminemment transgressive, pour R. Kaës, car elle appelle à la formulation d’une nouvelle métapsychologie voire d’une nouvelle conception de la subjectivité. Pour l’auteur, cet interdit de penser le groupe protégerait les groupes psychanalytiques de la compréhension de leur propre fonctionnement et en particulier de leurs traumatismes internes refoulés liés aux origines mêmes de la psychanalyse.
Le second chapitre aborde l’actualité de la transgression. Dans une approche sociologique et anthropologique, D. Vaginay rappelle que dans les sociétés où l’individualisme prime, la transgression peut avoir une vocation émancipatrice et participer…