Tendresse et psychanalyse, des liaisons dangereuses ?
À partir d’une pratique clinique du traumatisme psychique souvent extrême, Laurent Tigrane Tovmassian, docteur en psychopathologie et psychanalyse, et psychanalyste, interroge la place de la tendresse dans différents contextes théorico-cliniques. Il en propose une approche dans la relation thérapeutique entre le patient traumatisé, parfois très lourdement, et l’analyste auqel il est confronté. La tendresse est proposée ici comme « un acte », une intervention de l’analyste, touché par la détresse massive livrée par son patient et parfois renvoyé à ses propres traumatismes ou à certains éléments de son histoire personnelle. Par la reconnaissance de la détresse du sujet, cet acte peut prendre la forme d’une intervention, un moyen de faire contact, telle une intention pour tenter de transformer cette détresse. L’analyste peut aussi faire la proposition d’un « objet-refuge » à son patient, à condition que celui-ci corresponde à son monde interne. La thèse de Tovmassian est que la clinique du traumatisme nous montre que la tendresse permettrait la construction d’un double pont. Entre deux registres, celui de la survie, c’est-à-dire de l’autoconservation, et celui du psychosexuel qui permet notamment le déploiement du rêve et de l’illusion, initiant un mouvement libidinal, celui de la vie. Également entre le clivé et le refoulé.
La notion de tendresse n’est pas aisée à employer dans le champ de la psychanalyse. Difficile à assumer pour certains cliniciens, elle ramènerait à une conceptualisation qui serait faite de douceur, à la manière d’un câlin, idée déplacée dans ce contexte. Pour certains, elle ferait directement référence au toucher, banni du cadre classique du travail analytique, plus spécifiquement celui de la cure pratiquée de manière « orthodoxe » par lequel la neutralité impliquerait distance et retenue. Tovmassian assume cette idée du toucher, celui qui…