Freud voulait faire reconnaître sa découverte comme science nouvelle et indépendante. En ouvrant à nouveau cette question de l’épistémologie freudienne, Isabelle Alfandary — philosophe et psychanalyste, membre de la Société de Psychanalyse Freudienne, Professeure à l’Université Sorbonne Nouvelle et Professeure invitée dans nombre d’universités étrangères, ancienne présidente du Collège International de Philosophie — fait le point sur le mode d’élaboration par Freud de la pensée psychanalytique, tant clinique que théorique. Elle commente dans cette perspective quelques-uns des livres fondamentaux de Freud.
Fonder scientifiquement la psychanalyse et la transmettre
Ce livre fait toute sa place à la volonté freudienne de scientificité, manifeste tout au long de l’œuvre. Aujourd’hui, la psychanalyse est toujours sommée de faire la preuve de sa validité. L’hypothèse de l’inconscient repose sur le principe de l’universalité des processus psychiques, qui valent aussi bien pour la maladie que pour la santé, et sur un strict déterminisme psychique. Isabelle Alfandary veut montrer comment la pensée freudienne élargit la notion de rationalité, sans perdre sa rigueur. L’article de 1915 sur l’Inconscient est une référence centrale pour le dégagement de l’objet de cette science nouvelle et singulière qu’est la psychanalyse — l’écoute de l’analyste n’est pas de type religieux ou chamanique, et les références à la science et à la connaissance sont essentielles, alors même que l’inconscient n’est pas une chose ni un phénomène directement observable… Freud est resté réticent dans son usage de la notion de fiction ; au contraire, Isabelle Alfandary n’hésite pas à y recourir, mais en la redéfinissant. En effet, comme le rêve, la fiction (qui n’est pas le récit imaginaire ou forgé), « opère par déplacement et condensation — notamment par substitution ou analogie — et permet de saisir une relation qui ne peut être qu’obliquement mise en évidence,…