Comme le souligne le titre, Persécutions ne peut s’écrire qu’au pluriel, car les sources en sont diverses tout comme sont variables ses modes d’expression. Pluralité qui noue immanqua-blement les registres de l’intime, quand la persécution privilégie le registre des constructions psychiques, à celui du monde externe, quand s’impose au sujet une réalité évènementielle sociolo-gique, politique et historique. La persécution force les frontières. Certes, elle ne peut être confondue à la paranoïa, mais cette dernière permet d’en saisir un élément commun que relève judicieu-sement J. André : « à la différence des autres psychoses, le paranoïaque ne se débarrasse pas de toute la réalité extérieure… », mais « ces autres avec lesquels il “dialogue” ont précisément perdu leur altérité, ils ne sont plus que les sujets d’un monde totalitaire ». Or c’est bien l’enjeu d’altérité et son radical refus qui est au centre des persécutions humaines.
L’ouvrage à huit voix, par des approches originales ancrées dans des problématiques actuelles, joue donc différentes partitions de la persécution, travaillant à opérer des distinctions et délimitations, là où les brouillages s’imposent souvent trop aisément.
Tourments de C. Chabert, décrit avec finesse, soutenu par les fragments d’une cure, les risques de dérive vers la persécution, quand la destructivité s’allie aux excès de la haine. « Si l’objet naît dans la haine, quelle est la part prise par la persécution à sa constitution ? ». Poser ainsi la question interroge l’existence d’une traversée inéluctable d’un moment persécutif dans un travail analytique, et le rôle moteur que celle-ci peut jouer, car « l’inves-tissement d’objets persécuteurs combat le mélange et la confusion narcissiques et éloigne l’immo-bilisme mélancolique ». Mais la démesure peut avoir des effets redoutables et paradoxaux. Alors, et d’une autre manière, toujours l’existence d’un…