Dans une écriture particulièrement élégante, le livre de Yoann Loisel et Emeric Saguin explore les liens entre le traumatisme et la création.
Promis à la paisible carrière de commerçant avant la violence inouïe du conflit de 1914-1918, le jeune blessé de guerre Louis Destouches reprend ses études au sortir de la convalescence pour devenir médecin et écrivain en adoptant en 1932 le nom de plume de Louis Ferdinand Céline.
C’est ce point de départ « clinique », celui du choc (celui sans doute du « ça a commencé comme ça » qui ouvre le Voyage au bout de la Nuit) et du changement de cap d’une vie, que choisissent Yoann Loisel et Emeric Saguin pour nous emmener dans une remarquable lecture de l’œuvre profuse de Céline et de son écriture singulière.
A partir de l’effraction en tous sens produite par la profonde blessure et l’expérience du champ de bataille, nous suivons la densité d’une trajectoire qui cherche sans doute le retournement de la passivité en activité par l’exercice de la médecine et plus encore par la littérature. C’est bien aussi de l’expérience psychique particulière de lecture que crée cet écrivain que ces deux auteurs, tous deux psychiatres et analystes, le premier auprès d’adolescents et l’autre aux Hôpitaux des Armées, proposent de rendre compte. Dans cette écoute clinique particulière, tant du côté de Céline, avec ses multiples voix narratives, que du lecteur, se dessine un ombilic de l’écriture, et du chaos qui la traverse, comme les traces incessamment reçues d’un perpétuel Voyage au bout de la Nuit.
Intraitables insistances
Un premier intérêt de l’ouvrage est de montrer la déclinaison des motifs, de cette irrépressible répétition…