Dans son texte fameux « Une difficulté dans la psychanalyse », S. Freud soulignait les trois blessures narcissiques que la science avait infligées à l’humanité : la blessure copernicienne (la terre n’est pas le centre de l’univers), la blessure darwinienne (l’homme est un animal comme les autres) et la blessure psychanalytique (« le Moi n’est pas le maître dans la maison »).
Tout se passe aujourd’hui comme si ces trois blessures se trouvaient soudainement ravivées : plus on découvre d’exo-planètes et plus des voix s’élèvent pour continuer à proclamer que nous sommes seuls dans l’univers, « l’intelligent design » cherche désormais à affirmer que l’émergence de l’humain ne saurait être seulement due à la dynamique de la théorie de la sélection naturelle, et l’hostilité généralisée enfin envers la psychanalyse remet activement en question la découverte de l’inconscient.
Ne peut-on alors penser que les débats autour de l’autisme et la place que cette pathologie occupe actuellement dans le champ socio-culturel s’inscrivent en fait sur la trame de la réactivation de ces trois blessures narcissiques ?
Cette pathologie si douloureuse nous confronte en effet à trois grandes interrogations existentielles : les autistes viennent-ils d’ailleurs, quelle est leur part d’étrangeté et, last but not least, que viennent-ils nous dire de notre inconscient ?
Comme on le voit, les progrès de la science ne vont pas sans contrepartie, et ce sont peut-être aujourd’hui les polémiques passionnelles autour de l’autisme qui valent comme écho social de nos inquiétudes narcissiques.