Si le terme de subjectivation s’est trouvé de plus en plus utilisé au cours de ces dernières années, c’est qu’il semble désigner de façon spécifique la visée même du travail de psychanalyse, soit la reconnaissance et l’appropriation par le sujet d’éléments de sa psyché jusqu’alors refoulés, exclus ou apparemment indifférents ou secondaires et revêtant en réalité une importance insoupçonnée. Si, par Freud, elle semblait aller de soi dès lors que le processus psychanalytique, à travers la perlaboration et la réduction des résistances, débouchait sur une interprétation juste de la part de l’analyste et qui, par la même, ne pouvait qu’être approuvé par le patient, l’expérience clinique a révélé en maintes circonstances une problématique plus complexe ; quid, par exemple, de certains clivages subtils entre compréhension intellectuelle et conviction réelle ? Quant à l’analyste, lui, ne risque-t-il pas d’être entraîné par ses interprétations et associations à des propositions interprétatives allant en fait au-delà de ce qui était réellement en cause pour entraîner par effet de suggestion son interlocuteur dans des zones qui ne le concernent pas encore ou pas nécessairement ? Sans compter que la réception pure du passé refoulé laisse le sujet pris dans la littéralité d’un sens jusqu’alors caché et reproduit à l’identique. Celui-ci ne peut guère qu’en prendre acte ou tout au plus mesurer l’écart entre l’imago transférentielle et la réalité effective de l’analyste. On aboutit ainsi à combler la lacune du sens, en place d’ouvrir au sens, et à un sens lacunaire.
Aujourd’hui, le processus analytique se voit envisagé d’une tout autre manière. Soit une investigation menée par les deux protagonistes qui transforme ce qu’elle rencontre et se transforme par cette rencontre (J.-L. Donnet), dans l’expérience indéfinie d’une décentration du sujet, de son éveil à lui-même. Les fantasmes émergent tout autant…