Salomon Resnik nous a quittés ce matin du 16 février. Il s’agit d’un des grands psychanalystes de notre temps. Sa passion ? les psychoses. Il a su se former auprès des plus grands mais surtout développer son propre style avec un talent formidable.
Né en Argentine de parents émigrés russes, il passe son enfance et son adolescence à Buenos Aires. A dix-huit ans, il décide de faire médecine et devient psychiatre. Déjà, pendant sa médecine, sa rencontre avec plusieurs psychanalystes, dont Ernest Pichon Rivière, va avoir des effets décisifs sur sa trajectoire. Il devient analyste, membre de la Société Psychanalytique d’Argentine et prend en charge des personnes psychotiques et autistes avec un talent qui lui vaut la reconnaissance de ses collègues.
Après avoir fait une escale à Paris en 1957-1958, pour approfondir la sémiologie psychiatrique avec Georges Daumezon et d’autres, et rencontré Tosquelles, Oury et Lacan, il décide alors d’aller se former plus en profondeur en Angleterre, auprès de Herbert Rosenfeld et de Mélanie Klein.
Là, il rencontre les principaux psychanalystes de l’école anglaise, Donald Winnicott, Esther Bick, Mickaël Balint, Wilfried Bion, Ronald Laing et d’autres, avec lesquels il va se lier d’amitié.
Quelques années plus tard, il décide de venir s’installer à Paris et forme de très nombreux élèves à la psychanalyse, avec un intérêt particulier pour la psychanalyse des psychoses. Il va régulièrement à Venise pour y recevoir des analysants et animer de nombreux groupes de thérapies avec des analystes en formation et également avec des patients psychotiques hospitalisés. Il a participé à la formation de très nombreuses équipes de psychiatrie, d’enfants et d’adultes, sachant mêler avec un génie rare la pédagogie et la supervision, la psychopathologie et l’analyse du double-transfert.
Il a écrit de nombreux ouvrages, en espagnol, en anglais, en français, en italien. Les plus connus sont Personne et psychose (Ed. du Hublot, 2000) qui reprend une étude en profondeur des questions de l’image du corps dans la psychose, Espace mental (Erès, 1994) qui est la transcription de ses cours à l’université, Temps des glaciations (Erès, 1999) dont les cas cliniques évoqués sont d’une force inégalée, et beaucoup d’autres que je ne saurais tous citer ici.
Mais pour ceux qui ont eu la chance de le rencontrer, sa présence avait quelque chose d’unique, alliant une qualité d’accueil de l’autre exceptionnelle, avec une intuition clinique hors normes. Jean Ayme avait l’habitude de le présenter comme un polyglotte jonglant avec habileté entre les nombreuses langues qu’il avait apprises au cours de sa très longue existence, mais parlant également « le psychotique » avec une rare intelligence.
Nous partageons notre immense tristesse avec Anna Resnik Taquini, son épouse, et tous ceux qui ont pu profiter de sa présence et de son enseignement.