Il y a différentes manières d’aborder les problèmes de la psychopathologie, différentes manières qui ne sont pas nécessairement opposées, antagonistes ou contradictoires mais qui reposent sur des présupposés différents.
Une première manière, classique, tente de décrire les phénomènes de la psychopathologie et les fonctionnements psychiques qu’ils manifestent « en extériorité » et comme s’ils existaient « en soi », c’est-à-dire indépendamment d’un contexte et de leur adresse à un autre sujet. C’est la démarche qui caractérise la psychiatrie, et de ce point de vue qu’il s’agisse de la classification psychiatrique traditionnelle (type H. Ey par exemple) ou des divers DSM, il n’y a pas de différence. On peut raffiner cette description en introduisant dans la description un point de vue métapsychologique issu de la psychanalyse, c’est-à-dire en introduisant une intelligibilité du fonctionnement psychique qui réfère aux conflits et paradoxes du sujet, aux mécanismes de défenses qu’il met en œuvre dans la gestion de sa vie pulsionnelle et relationnelle, etc.
Une autre démarche, que seule la pratique clinique rend possible, est de décrire un fonctionnement psychique dans le contexte d’une « situation établie » (D.W. Winnicott 1945), ou « standard », telle la situation psychanalytique, et adressé à un clinicien. C’est à une telle tentative que je m’étais essayé en 1991 en décrivant dans un livre les « situations limites » de la psychanalyse, où j’essayais de décrire des conjonctures transférentielles « paradoxales » qui portaient à sa limite la logique de la technique et du dispositif psychanalytique. J’avais alors proposé cette notion pour décrire les effets d’un certain nombre de caractéristiques de la conjoncture transférentielle sur la situation psychanalytique, effets qui me semblaient propres à certaines formes de souffrances narcissiques en lien avec des conjonctures traumatiques précoces. Mon hypothèse globale était alors que les états de souffrances…