On parle souvent dans les équipes soignantes des phénomènes de clivages sans toujours bien réaliser qu’ils sont en rapport direct avec la psychopathologie des enfants accueillis et soignés. Dans le cadre de ce que j’appelle désormais une psychiatrie transférentielle, il y a donc lieu de s’interroger sur les mécanismes qui permettent d’en comprendre l’existence, et plus avant, d’y proposer des remèdes. C’est ce que je vais m’attacher à faire avec vous maintenant.
Etymologiquement, cliver, apparu en 1723, est emprunté au néerlandais klieven : fendre ; on connaît l’importance de l’industrie diamantaire à Amsterdam, ce qui explique que « clivage », signalé dès 17551, qualifie le procédé qui consiste à tailler un diamant pour ensuite le sertir sur une bague ou un bijou.
Freud va utiliser le terme de clivage pour désigner l’effet sur le moi de processus psychopathologiques qu’il met progressivement au jour.
Le clivage du moi désigne un phénomène bien particulier qu’il voit à l ‘œuvre surtout dans le fétichisme et les psychoses : la coexistence, au sein du moi, de deux attitudes psychiques à l’endroit de la réalité extérieure en tant que celle-ci vient contrarier une exigence pulsionnelle : l’une tient compte de la réalité, l’autre dénie la réalité en cause et met à sa place une production du désir. Ces deux attitudes persistent côte à côte sans s’influencer réciproquement2. Le clivage de l’objet est un mécanisme décrit par Melanie Klein et considéré par elle comme la défense la plus primitive contre l’angoisse : l’objet visé par les pulsions érotiques et destructives est scindé en un bon et un mauvais objet qui auront alors des destins relativement indépendants dans le jeu des introjections et des projections. Le clivage de l’objet est particulièrement à l’œuvre…