«… la haine dans le contre-transfert. Je crois que la tâche de l’analyste qui entreprend l’analyse d’un psychotique est sérieusement alourdie par ce phénomène et cette analyse de psychotique devient impossible si la propre haine de l’analyste n’est pas extrêmement bien dégagée et consciente. » Winnicott, 1947, p.72
Ma première rencontre avec Leslie m’a laissé un souvenir cuisant. La thérapeute de Leslie était partie à la retraite quelques mois auparavant, transmettant peu d’éléments pour la poursuite de la prise en charge. Quelques indices m’avaient laissée naïvement présager une rencontre facile avec une jeune dotée de belles capacités élaboratives, avide de poursuivre le travail engagé jusque-là avec ma prédécesseure. Contre toute attente, c’est le refus et l’opposition qui se sont invités au rendez-vous, me laissant vite désarçonnée.
Je vais tenter dans ce texte de rendre compte de la manière avec laquelle la relation thérapeutique a évolué, malgré les sentiments de rejet réciproques qui ont infiltré les rencontres avec cette jeune fille, que j’ai suivie de ses 14 à 19 ans. Je vais ensuite relater les ouvertures qui sont apparues, après trois années de suivi lorsque, au détour d’une de mes interventions verbales, un autre visage de Leslie est apparu, visage souffrant et non opposant, comme une partie clivée d’elle-même contre laquelle elle luttait sans cesse dans nos rencontres.
« C’est ma vie privée ! »
Lors de notre premier entretien, Leslie a 14 ans et demi, c’est une jeune adolescente, aux allures de petite fille. Cela fait déjà 6 ans qu’elle fréquente le CMP pour un comportement opposant et une forte anxiété, chez…