Suffit-il bannir le mot « neuropsychanalyse » ?
Éditorial

Suffit-il bannir le mot « neuropsychanalyse » ?

Comme il est difficile en France de s’entendre, voire tout simplement de débattre, au-delà des mots. Il suffit qu’un néologisme ou qu’un angliscisme (ce qui est pire !) arrive sur le marché des idées pour que le doute et le soupçon alimentent des présupposés qui réduisent à néant l’intérêt de la controverse. Voilà justement que nous arrive de l’anglophonie le terme de neuropsychanalyse. On peut suspecter l’intrusion de quelque forme nouvelle de psychanalyse, une psychanalyse qui partirait de la prise en compte d’un quelconque « neuro ». On pense à la neurophilosophie qui a pretendu instaurer une philosophie construite ou reconstruite à partir de la physiologie nerveuse ; ambition qui n’est d’ailleurs pas abandonnée, tant s’en faut, comme si la connaissance du cerveau permettait de donner sens aux structures et aux valeurs sociales.

Alors exit la neuropsychanalyse pour ne pas s’engager dans de mauvaise querelles ? Et après ? Devons-nous pour autant oublier que des êtres humains sont privés de capacités cognitives normales et que rien ne nous autorise à les écarter du champ de la pratique psychanalytique. Pensons ici aux enfants handicapés, aux adultes cérébro-lésés, aux personnes âgées.

Le débat est plus délicat quand il s’agit de confronter les théories psychanalytiques à des référents anatomo-physiologiques. On sait les risques que l’on prend à construire un parallèle entre modèles psychologiques et modèles cérébraux. Ne confondons pas les localisations cérébrales avec les topiques psychanalytiques ni les étiologies organiques avec les mécanismes psychogènes. Mais surtout évitons les risques d’un réductionnisme « tout neuronal » après avoir connu les excès du « tout psychique ». Neuropsychologie et psychanalyse ont des choses à se dire : il s’agit de trouver les mots et les concepts appropriés.