Difficile, lorsqu’on découvre le titre de cet ouvrage, de ne pas penser à J-L. Donnet qui écrivait à propos de son jeune « psychophobe » : « Roland, bien que très demandeur, ne dissimule rien de l’ennui profond qu’il éprouve, et comme j’insiste un peu, la mimique se ferme, le regard où luisait un fond d’angoisse s’éteint, une hostilité sourde monte contre celui qui parait vouloir le faire penser » (L’humour et la honte, 2009). Cette rencontre aurait tout à fait pu advenir dans une salle de consultation du Centre Alfred Binet - lieu historique de traitements psychanalytiques pour enfants et adolescents du XIIIe arrondissement de Paris - tant elle semble souffler sa question à cette monographie qui propose de repositionner les enjeux de la réflexivité face à la clinique contemporaine.
Bien qu'un peu dense, le diptyque théorique d'ouverture, signé par M. Ody et C. Delourmel, a le mérite de plonger l’ouvrage dans le bassin théorique freudien alors qu'on est davantage habitué, dans les pages « pédo-psychanalytiques » qui s'écrivent actuellement, à convoquer directement le W.R. Bion post-Réflexion faite pour s'épargner le détour par l'intrapsychique dans l'abord de la réflexivité. La pierre angulaire de ces deux textes, qui se répondent et se réfléchissent pour respecter le thème de l'ouvrage, est le destin pulsionnel du double retourne-ment, mouvement psychique préliminaire à l’établissement d’une pensée réflexive qui permettra à l’individu d’acquérir le surplomb nécessaire pour s’observer penser. Bien que l'objet soit parvenu à faire sa place dans les deux contributions - place incontournable en raison de la dimension spéculaire de la réflexivité - on pressent encore combien l'intersubjectivisme des années 1980 continue à scandaliser la pensée théorique française qui reste campée sur une position intrapsychique très marquée. Malgré cela, il est appréciable d'entendre…