Plus on en parle, moins on en fait…
Éditorial

Plus on en parle, moins on en fait…

On parle de plus en plus du handicap : à la télévision, au cinéma, dans la presse, et aussi dans les milieux psy. Mais plus on en parle, moins on en fait… Nul domaine n’est atteint à ce point-là par le décalage entre les discours « politiquement corrects » et les réalités décevantes, voire dramatiques, des enfants handicapés et leur famille. Volonté affichée d’intégration, mais refus des enfants dans les écoles. Discours sur la citoyenneté des handicapés, mais renvoi des jeunes adultes dans leurs familles. Prévention du handicap, mais peu de moyens pour les handicapés qui sont vivants. Pourquoi tant d’obstacles ? C’est que le handicap réveille des fantasmes inquiétants relatifs à la transmission et la sexualité, la vie et la mort : d’où ça vient ? qu’ai-je fait ? N’aurait-il pas mieux fallu qu’il ne vive pas ? D’où -au mieux- un évitement poli. Et -au pire- un rejet massif. D’où le glissement vers la « sentimentalité » que Winnicott a dénoncée comme « pire qu’inutile » et dont les différentes expressions -compassion, victimisation, moralisation- sont autant de formations réactionnelles contre l’effroi déclenché par celui qui brise notre image de l’intégrité humaine.