« Oui, même le grand amour vacille, on en oublie le prix du beurre car l’âme se resserre, toute entière, au trou étroit de la molaire "
La douleur physique
« Il est universellement connu, et il nous semble aller de soi que celui qui est affligé de douleur organique et de malaises abandonne son intérêt pour les choses du monde extérieur, pour autant qu’elles n’ont pas de rapport avec sa souffrance. Une observation plus précise nous apprend qu’il retire aussi son intérêt libidinal de ses objets d’amour, qu’il cesse d’aimer aussi longtemps qu’il souffre. La banalité de ce fait ne doit pas nous empêcher de lui donner une traduction dans les termes de la théorie de la libido. Nous dirions alors : le malade retire ses investissements de libido sur son moi, pour les émettre à nouveau après la guérison. " Son âme se resserre au trou étroit de la molaire ", nous dit W. Busch à propos de la rage de dents du poète. »1
Une rage de dents fait ainsi basculer l’esprit dans l’unique direction de la recherche d’un soulagement et la formule de l’humoriste Wilhelm Busch, que cite (partiellement) Freud (il oublie le prix du beurre et le grand amour…), décrit parfaitement cette restriction opérée sur l’esprit par la douleur physique. La douleur physique nous plonge dans l’actuel et arrête le cours du temps psychique, le passé et le futur n’ont plus de sens, seuls comptent l’acte ou les actes dont un soulagement pourrait venir, changer de position, hurler, boire, appeler à l’aide, maman de préférence…
Pourtant un investissement psychique intense peut limiter ou suspendre pour un temps la…